becfigue, bec-figue
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Petit passereau insectivore à bec fin ayant l’habitude de se gaver de fruits mûrs (figues, raisins, etc.) avant sa migration automnale, période où, devenu plus gras, il était considéré comme un gibier de choix en raison de la délicatesse de sa chair.
Largement usité du 16e au 19e siècle et appliqué principalement à des espèces européennes, becfigue se maintient surtout comme terme historique.
(sens étroit) D’une part, on constate que l’appellation becfigue pouvait servir à désigner prioritairement une espèce particulière considérée comme un gibier de choix, mais qu’il ne s’agissait pas nécessairement de la même espèce selon les auteurs ou les régions (fauvette des jardins ou babillarde? gobemouche noir? pipit des arbres ou farlouse?). La divergence des témoignages et des illustrations de l’époque révèle une large confusion quant à l’identification de l’oiseau associé à ce nom.
(sens large) D’autre part, plusieurs auteurs signalent que becfigue pouvait aussi servir de générique, notamment dans le sud de la France, pour désigner toute espèce de petit insectivore à bec fin apprécié pour sa chair grasse et délicate.
quasi-synonyme : (19e siècle) bec-fin.
passériforme.
Origine et histoire
Becfigue est répertorié pour la première fois comme nom d’« ung oyseau vivant de figues » dans le Dictionnaire francois latin de R. Estienne, publié en 1539. Cette appellation résulte d’un emprunt à l’italien où beccafico, composé de becca (forme impérative de beccare « becquer » et de fico « figue », a cours depuis le début du 16e siècle. Jusqu’au 18e siècle, on relève des variantes du mot français, comme beccafigue, bécafigue, becquefigue et bequefigue, qui conservent des liens plus étroits avec le composé italien d’origine. La forme becfigue (ou bec-figue) témoigne quant à elle d’une adaptation du premier élément de composition, la forme verbale becque étant réinterprétée comme le substantif bec.
Chez les naturalistes français du 18e siècle, bec-figue est d’abord présenté comme le nom spécifique d’une petite espèce de passereau à bec fin étroitement apparenté aux fauvettes. M. Brisson (1760) choisit cette espèce comme type de base d’un vaste sous-ensemble de petits insectivores partageant une série de caractéristiques morphologiques. Dans ce sous-ensemble qu’il appelle « Genre du becfigue » (en latin « Genus Ficedulae »), Brisson classe sensiblement les mêmes espèces européennes (fauvettes, rossignols, rougegorges, etc.) que G. Cuvier regroupera en 1798 dans le genre auquel il donnera le nom de « Les Becs-fins » (en latin Motacilla), entraînant le remplacement rapide au 19e siècle de becfigue par bec-fin comme nom d’un type morphologique particulier d’oiseaux.
Dans son Histoire naturelle des oiseaux (1778), G.-L. Leclerc de Buffon témoigne de la confusion qui règne à son époque quant à la valeur référentielle de l’appellation bec-fin qu’il réserve quant à lui à une seule espèce (vraisemblablement le gobemouche noir), dont la caractéristique la plus apparente du plumage est « une tache blanche qui coupe l’aile transversalement ».
Ces oiseaux, dont le véritable climat est celui du Midi, semblent ne venir dans le nôtre, que pour attendre la maturité des fruits succulens dont ils portent le nom; ils arrivent plus tard au printemps, & ils partent avant les premiers froids d’automne. […] Les bec-figues [sic] arrivent en Lorraine en avril, & en partent au mois d’août, même quelquefois plus tôt. On leur donne dans cette province le nom de mûriers & de petits pinçons des bois, ce qui n’a pas peu contribué à les faire méconnoître; en même-temps on a appliqué le nom de bec-figue à la petite alouette des prés, dont l’espèce est très-différente de celle du bec-figue; & ce ne sont pas les seules méprises qu’on ait faites sur ce nom. […] Dans nos provinces méridionales & en Italie, on appelle confusément bec-figue, toutes les différentes espèces de fauvettes, & presque tous les petits oiseaux à bec menu & effilé; cependant le vrai bec-figue y est bien connu, & on le distingue par-tout à la délicatesse de son goût.
Source de la citation : Leclerc de Buffon, 1778
Selon J. l’Hermite (1920), un ornithologue du début du 20e siècle, Leclerc de Buffon se serait lui-même fourvoyé quant à l’identification de l’espèce plus spécifiquement appelée bec-fin, l’appliquant à un gobemouche alors que ce type d’oiseau, contrairement aux fauvettes, n’aurait pas d’attirance particulière pour les fruits.
Références et notes
Source(s) métalinguistique(s)
- TLFi, sous bec.
- FEW 1 beccus, p. 307a; 3 ficedula, p. 493b.
- Cabard et Chauvet (2003), p. 318.
- Estienne, Robert (1539). Dictionaire françois latin, contenant les motz e& manieres de parler francois, tournez en latin (gallica.bnf.fr, 2020/03/17).