gode
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Synonyme vieilli ou régional de petit pingouin*.
À époque ancienne ou localement (Basse-Côte-Nord, îles de la Madeleine, Saint-Pierre-et-Miquelon notamment), ce nom peut aussi servir à désigner deux grandes espèces de guillemots à ventre blanc proches du petit pingouin par la taille, le port dressé et le coloris. Ces deux espèces du genre Uria, qui nichent sur les côtes de l’Atlantique Nord et du golfe du Saint-Laurent, sont aussi connues sous le nom de marmette (guillemot marmette* et guillemot de Brünnich*).
alcidé; charadriiforme.
Origine et histoire
Les premières attestations de gode comme nom d’oiseau de mer figurent dans des documents des 16e et 17e siècles relatifs à la Nouvelle-France, aux côtes de Terre-Neuve et du golfe du Saint-Laurent. D’après les contextes où il est mentionné, il y a tout lieu de croire que ce mot pouvait alors désigner le petit pingouin mais aussi les grands guillemots de couleur et de taille similaires. Selon C. de la Morandière, gode avait cours dès le début du 17e siècle dans la langue des pêcheurs français qui fréquentaient les bancs de Terre-Neuve. Cette dénomination figure, sans précision de genre, dans la première relation de voyage de J. Cartier (1536 environ) sous la forme du pluriel godez :
Davantaige y a une aultre sorte d’ouaiseaulx qui vont en l'air et en la mer qui sont plus petiz [que les apponatz ou grands pingouins] que l'on nomme godez qui se ariment et meptent à ladite isle [= isle aux Ouaiseaulx, aujourd’hui Funk Island, près de Terre-Neuve] soubz les plus grans.
Source de la citation : Cartier, vers 1536
On relève la première précision de genre en 1672, dans l’Histoire naturelle de N. Denys, où le mot est féminin :
la Gode, c'est un oyseau qui vole aussi vîte qu'une flesche, le blanc & noir est son plumage [...].
Source de la citation : Denys, 1672
C’est doté de ce genre que le terme gode a été introduit dans la lexicographie française lors la seconde édition du dictionnaire d’A. Furetière (1701). Le responsable de cette édition, H. Basnage de Bauval, semble avoir rédigé son article en prenant comme source le texte de Denys :
Gode. s. f. Sorte d’oiseau de mer. Il a le plumage blanc, & noir. On dit que le vol de la gode est aussi vîte que celui d’une fleche.
Source de la citation : Dictionnaire de Furetière, 1701
Le mot sera également consigné au féminin dans les dictionnaires suivants des 18e et 19e siècles. Si, dans certaines régions comme l’archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon, le genre féminin est toujours attesté, ce n’est pas le cas au Québec où, depuis la première moitié du 20e siècle, on le relève essentiellement au masculin.
Les attestations de gode « oiseau de mer » recueillies en France depuis le 18e siècle ont principalement été relevées sur les côtes de la Manche, notamment en Haute-Bretagne et en Picardie, région maritime d’où pourrait éventuellement provenir cet emploi. On ne connaît toutefois pas l’origine étymologique précise du mot lui-même.
Taxonomie et nomenclature
Gode a été introduit dans la nomenclature en usage au Québec et au Canada en 1957 comme nom technique du petit pingouin et s’y est maintenu jusqu’en 1983. Selon l’usage québécois de l’époque, gode est alors de genre masculin. Le mot avait d’abord été signalé comme nom usuel dès 1883 par C.-E. Dionne (sous la graphie godd).
Références et notes
Source(s) métalinguistique(s)
- FEW 4 god–, p. 185a; 21 (étymons inconnus), p. 241a.
- Brasseur, Patrice et Jean-Paul Chauveau (1990), Dictionnaire des régionalismes de Saint-Pierre et Miquelon, p. 364-365.
- Dulong, Gaston et Gaston Bergeron (1980). Le parler populaire du Québec et de ses régions voisines, volume 6, question 1508.
- Fonds documentaires du Trésor de la langue française au Québec (tlfq.ulaval.ca/fichier, 2018/02/26).
- Furetière, Antoine (1701). Dictionnaire universel, seconde édition par Basnage de Bauval.
- Cabard et Chauvet (2003), p. 202.
- Donovan et Ouellet (1993).