pie
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Grand passereau omnivore des régions agricoles ou légèrement boisées de l’hémisphère Nord tempéré, voisin de la corneille mais dont la queue est très longue et dont le plumage comporte des zones noires (notamment à la tête), blanches (sur les côtés) et bleutées (sur les ailes et la queue).
Dans le contexte européen, le mot pie, associé à ce type d’oiseau et employé sans autre spécification, désigne généralement la pie bavarde et, dans le contexte nord-américain, la pie d’Amérique.
Dans le passé, le mot pie a aussi servi, par extension, à désigner d’autres corvidés à longue queue (pirolle, piapiac, témia).
(Qc/Ca) (20e siècle) Nom usuel du mésangeai du Canada.
(pour exprimer le cri) jacasser, jaser.
corvidé; passériforme.
Origine et histoire
Attestée en français depuis le 12e siècle (1175) comme nom de la pie bavarde, pie est issu du latin pica qui servait à désigner le même oiseau. En latin, la forme féminine pica, qui signifiait également « bavard », avait comme pendant masculin picus, le nom latin du pic.
En ancien français, la pie bavarde a d’abord porté le nom d’origine germanique agace (ou agasse), que pie est venu concurrencer avant de s’imposer comme principale dénomination en français.
Le plumage de la pie bavarde présentant un fort contraste de noir et de blanc, le mot pie va connaître par la suite divers développements d’emplois basés sur ce contraste chromatique. Dès le moyen français, on relève l’adjectif pie « tacheté de noir (ou de brun) et de blanc » appliqué au pelage des chevaux. Et le mot pie entre dans la composition d’autres noms d’oiseaux au plumage marqué de noir et de blanc, dont pie de mer « huitrier pie » et pie-grièche (voir les commentaires de P. Belon du Mans ci-dessous et à l’article pie grièche).
De la Pie, ou Becasse de mer. […] Il y a un oyseau palustre ia [= déjà] cogneu, lequel les uns, pource que ses aelles ont une ligne blanche par le travers comme une Pie, l’ont appellé Pie de mer. Les autres luy voyants le bec aussi long que celuy d’une Becasse, le nomment Becasse de mer.
Source de la citation : Belon du Mans, 1555
Au Québec et dans l’est du Canada, où la faune indigène ne compte aucune espèce de type pie (genre Pica), le mot pie est utilisé comme nom usuel du mésangeai du Canada, une espèce forestière nord-américaine proche des geais. Un bref passage de L'Histoire véritable et naturelle des mœurs et productions du pays de la Nouvelle-France, vulgairement dite le Canada (1664) suggère fortement que l’emploi pourrait remonter au 17e siècle. L’auteur, P. Boucher, y associe les pies aux geais et signale que leur couleur cendrée les démarque des pies de France :
Il y a des Hirondelles, Martinets, Geays, Pies, mais elles ne sont pas comme celles de France : car elles sont cendrées & mal-bâties.
Source de la citation : Boucher, 1664
Presque deux siècles vont s’écouler toutefois avant que l’emploi de pie comme nom du mésangeai soit clairement signalé, au milieu du 19e siècle, par le premier naturaliste québécois, J. M. LeMoine. Selon LeMoine et les autres naturalistes de son époque, cette appellation était alors déjà largement répandue dans la population.
Comment expliquer l’attribution du nom de pie au mésangeai du Canada? La motivation du coloris du plumage paraît moins évidente : le mésangeai présente bien deux teintes de gris (gris sombre à l’arrière, gris blanchâtre à l’avant) mais il n’offre pas le contraste plus net dont rend habituellement compte l’adjectif pie. Par ailleurs, le mésangeai se démarque du geai par une queue plus longue, une autre caractéristique morphologique de la pie qui pourrait être envisagée comme base de l’extension. Se pourrait-il d’autre part que la motivation du nom tienne à un trait de comportement, comme on l’avance parfois? La pie d’Europe est connue comme un oiseau bavard et bruyant, mais ce trait n’est pas particulièrement caractéristique du mésangeai. La pie a aussi, depuis le 19e siècle, la réputation d’être voleuse. Et certains auteurs contemporains soutiennent que le mésangeai, qui se montre très familier près des camps forestiers où il peut facilement trouver de la nourriture, a reçu le nom de pie (ou de pie voleuse) en raison de son comportement chapardeur. Comme on ne dispose d’aucun témoignage ancien allant dans ce sens, on ne peut écarter la possibilité qu’il ne s’agisse là que d’une simple remotivation récente.
Taxonomie et nomenclature
Dans la nomenclature actuelle, le générique pie sert à désigner une dizaine d’espèces de passériformes de la famille des corvidés, réparties dans les genres Pica et Cyanopica.
Des trois espèces reconnues à la fin du 20e siècle, deux ont récemment été scindées, soit la pie bavarde du genre Pica (divisée aujourd’hui en une demi-douzaine d’espèces) et la pie-bleue du genre Cyanopica (divisée en deux espèces, l’une européenne et l’autre asiatique).
Dans des noms composés
Espèces présentes en Europe ou au Canada :
pie bavarde* [Pica pica] : grande espèce eurasienne à plumage noir et blanc, avec des reflets bleu verdâtre aux ailes et à la queue. [(Fr/Eu) synonyme ancien ou régional : agace ou agasse.]
Cette dénomination a déjà servi a désigner d’autres espèces similaires, dont la pie d’Amérique* qui, encore au 20e siècle, était considérée comme une forme nord-américaine de la même espèce.
pie-bleue ibérique*, pie bleue, pie ibérique [Cyanopica cooki (précédemment Cyanopica cyanus)] : espèce présente en Espagne et au Portugal, plus petite que la pie bavarde et à port plus dressé, à corps beige, avec la tête noire, la gorge blanche, ainsi que les ailes et la queue bleu clair.
Chez certains auteurs, pie bleue est aussi synonyme de pirolle.
pie d’Amérique* [Pica hudsonia] : espèce voisine de la pie bavarde, présente dans l’ouest du Canada et des États-Unis.
Jusqu’au 20e siècle, ce corvidé était aussi connu sous le nom de pie bavarde (voir ci-dessus).
Autre espèce de corvidé à longue queue ayant porté le nom de pie :
pie du Sénégal : (18e–19e siècle) synonyme ancien de piapiac africain*.
Espèces dénommées pie en raison du coloris de leur plumage :
pie de mer : synonyme de huitrier pie*.
À époque ancienne, on disait aussi bécasse de mer.
pie-grièche : (voir l’article correspondant).
Références et notes
Source(s) métalinguistique(s)
- TLFi
- FEW 8 pica, p. 420b.
- Robert historique (1992).
- Cabard et Chauvet (2003), p. 338.
- Donovan et Ouellet (1993).
- Dulong, Gaston et Gaston Bergeron (1980). Le parler populaire du Québec et de ses régions voisines, vol. 6, question 1528.
- Lavoie, Thomas, et collaborateurs (1985). Les parlers français de Charlevoix, du Saguenay, du Lac-Saint-Jean et de la Côte-Nord, tome 2, question 689.
Base(s) ornithologique(s) de référence
Date de consultation :
- Avibase
- HBW Alive
- Oiseaux.net