rougegorge, rouge-gorge
Début de l'article
Petit passereau insectivore rondelet, à dessus brunâtre, à poitrine généralement rousse ou jaunâtre et à ventre blanc, qui, à l’exception du rougegorge familier* d’Eurasie, fréquente les forêts de l’Afrique subsaharienne.
Dans le contexte européen, la dénomination rougegorge, utilisée sans autre spécification, sert généralement à désigner le rougegorge familier.
muscicapidé; passériforme.
(Qc/Ca) Nom usuel du merle d’Amérique*.
Dans le contexte nord-américain, la dénomination rougegorge, utilisée sans autre spécification, fait généralement référence au merle d’Amérique.
Origine et histoire
La dénomination rouge-gorge est attestée depuis le 15e siècle (1464). On en relève la première mention (hors contexte, sous la forme roughe gorge) dans le Catholicon de Jehan de Lagadeuc, un dictionnaire trilingue (moyen breton, moyen français et latin). Dans son traité d’ornithologie de 1555, P. Belon du Mans donne une description du rougegorge familier dans un article intitulé « De la Gorge rouge, ou Rubeline », mais on observe dans son texte l’alternance des formes gorge rouge et rouge gorge :
Que le Rossignol de muraille n’est pas tout un avec la Gorge rouge, & que c’est une espece differente, leurs pieds le nous font à sçavoir. […] Nous en avons fait l’espreuve : joinct aussi qu’ayants tendu [des filets] l’esté par les forests, en avons prins des uns & des autres, trouvants manifeste difference de la Rouge gorge au Rossignol de muraille.
Source de la citation : Belon du Mans, 1555
L’hésitation entre ces deux dernières variantes va se prolonger jusqu’au 18e siècle, mais la seconde, adoptée par le naturaliste M. Brisson en 1760 sous la graphie rouge-gorge, va rapidement s’imposer par la suite. La variante technique soudée rougegorge date quant à elle de la fin du 20e siècle.
De genre féminin chez Belon du Mans, cette dénomination le sera encore chez Brisson deux siècles plus tard. En revanche, dans son Histoire naturelle des oiseaux (1778), G.-L. Leclerc de Buffon lui donnera le genre masculin, ce qui contribuera à un rapide changement de genre.
La large zone antérieure rouge orangé qui caractérise le plumage du rougegorge familier est évidemment à l’origine de son nom (composé de rouge au sens de « roux vif », en parlant d’un animal, et de gorge). D’abord associée à cette seule espèce, l’appellation rouge-gorge va progressivement devenir un générique et s’étendre à d’autres espèces, étroitement apparentées ou présentant un coloris similaire. C’est ainsi qu’au 18e siècle, le merlebleu de l’est de l’Amérique du Nord est appelé rouge gorge de la Caroline par M. Catesby (1731), sur la base de sa ressemblance avec le rougegorge familier d’Europe :
Sa tête, le dessus de son corps, de sa queue & de ses ailes sont d’un bleu fort vif, excepté que les extrémités des plumes des ailes sont brunes. Sa gorge & sa poitrine sont d’un rouge sale. Son ventre est blanc. C’est un oiseau fort doux : il ressemble à notre rouge-gorge. Il ne se nourrit que d’Insectes. Il est très commun dans toute l’Amérique septentrionale […].
Source de la citation : Catesby, 1731
L’espèce nord-américaine sera ensuite renommée rouge-gorge bleu(e) par Brisson (1760, au féminin) et par Leclerc de Buffon (1778, au masculin), nom qui sera repris sous sa forme masculine dans la nomenclature nord-américaine de C. E. Dionne (1883) à P. A. Taverner (1922).
Quant à l’emploi de rouge-gorge pour désigner le merle d’Amérique, il semble être nettement plus tardif. On en relève une première attestation en 1861 dans le traité d’ornithologie de J. M. Lemoine , où l’article consacré à cet oiseau porte le double titre de « merle ou rouge-gorge du Canada ». Dans les fonds documentaires du Trésor de la langue française au Québec, l’usage en contexte de rouge-gorge comme synonyme de merle n’est illustré qu’à partir du début du 20e siècle; cette extension d’emploi pourrait donc résulter de l’influence de l’anglais robin qui, à l’époque, servait déjà chez les Anglo-Saxons à désigner à la fois le rougegorge familier d’Europe (European Robin) et le merle d’Amérique (American Robin).
Taxonomie et nomenclature
Dans la nomenclature actuelle, le générique rougegorge (forme soudée) sert à désigner une quinzaine d’espèces de passériformes de la famille des muscicapidés, classées dans les genres Erithacus, Pogonocichla, Sheppardia (genre principal), Stiphrornis et Swynnertonia.
Par ailleurs, par référence au coloris de leur plumage, le composé rougegorge entre comme élément spécifique dans la dénomination d’un bon nombre d’autres espèces de diverses familles (accenteur rougegorge, pèrenoir rougegorge, précédemment sporophile rougegorge, tangara rougegorge).
Dans des noms composés
Seule espèce présente en Europe :
rougegorge familier* [Erithacus rubecula] : oiseau chanteur des jardins et milieux boisés d’Eurasie et d’Afrique du Nord, à dos brunâtre, à face et poitrine rouge orangé, et à ventre clair, qui se nourrit d’invertébrés et de petits fruits.
Espèce nord-américaine voisine anciennement appelée rouge-gorge:
rouge-gorge bleu : (18e–20e siècle) ancien nom du merlebleu de l’Est*.
Références et notes
Source(s) métalinguistique(s)
- TLFi
- FEW 4 gurges, p. 337a.
- Fonds documentaires du Trésor de la langue française au Québec (tlfq.org/base-de-données, 2021/11/12).
- Cabard et Chauvet (2003), p. 279-280.
- Hageman (2000), p. 149.
- Godefroy, Frédéric (1883). Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle. Complément, vol. 2, p. 68 (micmap.org; 2020/01/28).
Base(s) ornithologique(s) de référence
Date de consultation :
- Avibase
- HBW Alive
- Oiseaux.net