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solitaire

Genre

masculin

Prononciation

[sɔlitɛʀ]

Début de l'article

Définition (emploi secondaire du mot-entrée).

(17e–18e siècle) Nom donné à des oiseaux terrestres des îles Mascareignes (ibis de la Réunion* et dronte de Rodrigues*) qui, comme le dronte de Maurice, étaient de forte taille et inaptes au vol en raison de leurs ailes atrophiées.

Définition (emploi principal du mot-entrée).

(Depuis le 20e siècle) Passereau insectivore et frugivore des forêts de montagnes de l’Amérique tropicale et de l’archipel d’Hawaï, à plumage généralement grisâtre ou brunâtre, avec les yeux souvent cerclés de blanc et la queue relativement longue, qui est voisin de la grive mais peut rappeler le gobemouche par son aspect et son comportement.

Nom(s) associé(s): ensemble d’oiseaux plus large.

turdidé; passériforme.

Origine et histoire

Issu du latin solitarius, l’adjectif solitaire est utilisé comme élément spécifique de noms composés d’oiseaux depuis au moins le 16e siècle, époque à laquelle le naturaliste P. Belon du MansBelon du Mans, Pierre (1555). L'Histoire de la nature des oyseaux, avec leurs descriptions, et naïfs portraits retirez du naturel, p. 322 (GoogleLivres, 2020/01/20). décrivait sous le nom de paisse solitaire un oiseau voisin des grives (vraisemblablement le monticole bleu). Chez les naturalistes du 16e siècle qui publiaient en latin (comme l’italien U. Aldrovandi et le suisse C. Gesner), on donnait d’ailleurs à cet oiseau le nom de Passer solitariusBelon du Mans avait déjà lui-même établi un lien entre paisse solitaire et la mention de Passer Solitarius dans un passage de la Bible (psaume du roi David)..

Nous deduisons maintenant un oyseau que le vulgaire a voulu nommer une Paisse solitaire. Si maintenant nous voulons enquerir la raison, il ne sera trop difficile de la trouver : c’est que les habitants des lieux abismez entre les montagnes, trouvants un certain oyseau faire son nid es precipices des rochers, l’ont jugé solitaire.

Source de la citation : Belon du Mans, 1555

Les premiers emplois substantivaux de solitaire comme nom d’oiseau datent de la seconde moitié du 17e siècle et servent alors à désigner deux espèces endémiques des îles Mascareignes (éteintes au 18e siècle), respectivement l’ibis de la Réunion dans les relations de voyage de l’abbé B. CarréBarthelemy Carré décrit cet oiseau dans la partie consacrée à son passage à la Réunion en 1668. Voir le compte-rendu dans : Prévost, (abbé) Antoine François (1751). Histoire générale des voyages, ou Nouvelle collection de toutes les relations de voyages par mer et par terre, tome 33, p. 5 « Les Habitans [de l’Isle de Bourbon (aujourd’hui La Réunion)] le nomment le Solitaire, parce qu’aimant en effet la solitude il ne se plaît que dans les Cantons les plus écartés. Il est toujours seul, & jamais on n’en trouve deux ni plusieurs ensemble. » (GoogleLivres, 2020/01/20). et du Sieur Dubois[Dubois, Sieur] (1674). Les voyages faits par le sieur D.B. aux isles Dauphine ou Madagascar et Bourbon ou Mascarenne, ès années 1669, 70, 71 et 72, p. 170 (GoogleLivres, 2020/01/21)., et le dronte de Rodrigues dans celle de F. Leguat[Leguat, François] (1708). Voyage et avantures de François Leguat, & de ses compagnons, en deux isles désertes des Indes orientales, tome 1, p. 98 et suivantes (Gallica.bnf.fr, 2020/01/21). Leguat a vécu sur l’île de Rodrigues de 1691 à 1693..

Solitaires, ces oyseaux sont nommés ainsi, parce qu’ils vont tousjours seuls, ils sont gros comme une grosse Oye, & ont le plumage blanc, noir à l’extremité des aisles & de la queuë. A la queuë il y a des plumes approchantes de celles de l’Autruche, ils ont le col long & le becq fait comme celuy des becasses, mais plus gros, les jambes & pieds comme Poullets d’Inde. Cet oyseau se prend à la course ne volant que bien peu. C’est un des meilleurs gibier de l’Isle. 

Source de la citation : Sieur Dubois, 1674

Au milieu du 18e siècle (1760)Brisson, Mathurin (1760). Ornithologie ou Méthode contenant la division des oiseaux en ordres, sections, genres, especes & leurs variétés, tome 2, p. 268 et suivantes (GoogleLivres, 2020/01/20)., le naturaliste M. Brisson utilise quant à lui le nom de solitaire pour désigner trois oiseaux d’autres régions du monde qu’il rattache au « genre de la Grive », dont l’espèce eurasienne précédemment appelée paisse solitaire par Belon du Mans et deux autres passereaux d’origine asiatiques. Ces passereaux seront rebaptisés merles solitaires par P. Guéneau de Montbeillard en 1775Buffon, Georges-Louis Leclerc de, et coll. (1775). Histoire naturelle des oiseaux, t. 3, p. 358 et suivantes (GoogleLivres, 2020/01/22)., ce qui mènera à l’abandon de l’emploi substantival adopté par Brisson.

Lorsqu’au début du 20e siècleSociété nationale d’acclimatation de France, La (1924). Revue d’histoire naturelle appliquée. Oiseau et la revue française d’ornithologie, volume 5, p. 117 (GoogleLivres, 2020/01/21)., le substantif générique solitaire sera réintroduit dans la nomenclature française, ce sera finalement dans son emploi actuel et sous l’influence de la nomenclature anglaise, où solitaire servait déjà depuis les années 1870Baird, S. F., T. M. Brewer et R Ridgway (1874). History of North American Birds, volume 1, p. 409 (GoogleLivres, 2020/01/21). chez les naturalistes américains à désigner le solitaire de Townsend (Townsend’s Solitaire). E. Coues (1878)Coues, Elliott (1878). Birds of the Colorado Valley, p. 47 (GoogleLivres, 2020/01/21). explique ainsi l’origine de cet emploi en anglais :

The sociable disposition which Townsend’s Thrush manifests during the winter, contrasting with those traits it shows at other seasons so conspicuously that it has acquired the soubriquet of "Solitaire" is also attested by Mr. J. K. Lord […]

Source de la citation : E. Coues, 1878

Les emplois successifs en français du terme substantival solitaire comme nom d’oiseaux ne sont donc pas directement liés.

Taxonomie et nomenclature

Le générique solitaire sert actuellement à désigner la douzaine d’espèces de passériformes de la famille des turdidés que compte le genre Myadestes. Certaines sources (Cinfo, Oiseaux.net) l’associent également aux espèces voisines des genres Entomodestes (2) et Cichlopsis (1), alors que d’autres (Avibase, HBW) les dénomment plutôt à partir du générique grive.

Dans des noms composés

Sous-ensemble de noms d’espèces.

(17e–18e siècle) :

Nom(s) composé(s) d’espèce(s) faisant l’objet d’une sous-entrée.

solitaire de la Réunion, solitaire de Bourbon : synonymes historiques d’ibis de la Réunion*.

Nom(s) composé(s) d’espèce(s) faisant l’objet d’une sous-entrée.

solitaire de Rodrigues : synonyme historique de dronte de Rodrigues*.

Sous-ensemble de noms d’espèces.

Seule espèce de solitaire présente au Canada et aux États-Unis :

Nom(s) composé(s) d’espèce(s) faisant l’objet d’une sous-entrée.

solitaire de Townsend* [Myadestes townsendi] : espèce présente dans l’ouest du continent nord-américain (depuis le nord du Mexique jusqu’en Alaska), à plumage gris uni, avec une tache chamois sur l’aile et les yeux nettement cerclés de blanc.

Références et notes

Source(s) métalinguistique(s)

  • FEW 12 solitarius, p. 61a.
  • Donovan et Ouellet (1993).

Base(s) ornithologique(s) de référence

Date de consultation :

  • Avibase
  • HBW Alive
  • Oiseaux.net

Note(s)